La dernière fois que Mahmoud Ahmadinejad
a mis les pieds sur le sol cubain, la maladie de Fidel Castro était
annoncée depuis quelques semaines et avait provoqué des tonnes de
spéculations. Ce mois de septembre 2006, le président iranien avait été
témoin de la façon dont on donnait la présidence du Mouvement des Pays
Non Alignés à un chef d’Etat en incapacité physique de l’exercer. Au
lieu du Leader Maximo, c’est de son frère cadet qu’il entendit le
discours dans le Palais des Conventions, pendant que dans les couloirs
et devant les caméras les porte-parole officiels annonçaient le retour
prochain du Commandant en Chef. Mais ils mentaient. Sur la photo de
clôture de l’événement –sur la pelouse et sous un soleil espiègle-
figurent les gouvernants invités mais l’hôte principal est absent. A la
lumière d’aujourd’hui cette photo était presque une image prémonitoire
car elle a marqué la perte du rôle de l’ancien guérillero dans la vie
politique internationale.
Aujourd’hui, Ahmadinejad est revenu pour
un nouvel instantané. Cette fois cela se fera à huis clos, presque sans
témoin et sur le lieu de convalescence de Fidel Castro, là où il rédige
ses très longues réflexions. Beaucoup de choses ont changé pour les
deux hommes au cours de ces cinq années. Le premier se trouve pris dans
une escalade de tension avec Washington et a même menacé de fermer le
détroit d’Ormuz ; le second voit l’affaiblissement progressif de son
image à l’intérieur et à l’extérieur du pays et il a perdu une grande
partie de l’ascendant qu’il avait autrefois.
Le politique impulsif qu’il fut, sur le
point de déclencher en 1963 la troisième guerre mondiale pendant la
crise des missiles, reçoit aujourd’hui le leader perse qui pourrait être
partie prenante du prochain conflit. Les deux ont d’urgence besoin de
cette nouvelle photo de famille. L’un pour prouver qu’il n’est pas aussi
seul que la diplomatie nord-américaine veut le faire croire, et l’autre
parce qu’il a besoin de démontrer qu’il est encore vivant,
contrairement à ce que l’on murmure sur les réseaux sociaux. Mais ce
sera un portrait en sépia, car il manquera la couleur verte, devenue au
cours de ces cinq années une teinte désagréable pour les deux. A Fidel
Castro elle rappelle ce qu’il fut, l’uniforme duquel émanait une part
importante de son pouvoir, tandis qu’elle évoque pour Ahmadinejad les
protestations des jeunes dans les rues, Leda et l’été 2009.
Traduit par Jean-Claude MAROUBY
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